L'ESCLAVE AUX CLOCHETTES
Nombre de pages | 150 |
Dimensions | 110*178 mm |
Langue | Français |
Date de parution | 31/01/1998 |
Référence | R00019 |
Extrait gratuit
I
Une soirée particulière
À deux heures du matin, lorsque le dernier invité fut parti, la jeune femme referma la porte et tira le verrou. Elle se retourna et s’avança vers Tanguy avec empressement, ne voulant pas le faire attendre. Viola était ravissante avec ses longs cheveux châtains et ses grands yeux noisette, mais ce n’était pas le plus frappant. Quiconque, entrant à ce moment dans l’appartement où flottaient des effluves de cigares, se fût étonné de sa tenue insolite. Car si elle portait une jupe longue, elle était nue jusqu’à la ceinture, exhibant sa poitrine juvénile, dont les pointes et les aréoles étaient soigneusement maquillées d’ocre et de vermillon.
Elle s’efforçait de n’en rien laisser paraître, mais un léger tremblement des lèvres et du menton trahissait chez elle une appréhension. Quoi qu’il lui soit arrivé durant cette soirée, cela avait dû être inhabituel, et cela n’était rien auprès de ce qui l’attendait maintenant.
Tout en déboutonnant son col de chemise, Tanguy lui rappela qu’ils avaient « un compte à régler, tous les deux » dès qu’elle en aurait fini avec les tâches ménagères. Il lui parlait sur un ton d’autorité qui ne se discute pas, et que leur différence d’âge accentuait encore. Quadragénaire, il avait une quinzaine d’années de plus que Viola. Celle-ci avait parfaitement compris, elle savait de toute évidence de quoi il s’agissait. Après avoir débarrassé la table et remis de l’ordre dans la salon et la cuisine, elle se présenta à Tanguy, prête pour la punition qu’elle était consciente d’avoir mérité.
Laconique, il lui indiqua le lieu adéquat : leur chambre. Elle s’y rendit aussitôt et, obéissant à des règles immuables, se déshabilla complètement, puis se mit à genoux sur le grand tapis noir disposé au pied du lit. Les mains sur la nuque, et tâchant de se tenir bien droite, elle attendit le bon plaisir de Tanguy. Un quart d’heure s’écoula avant qu’il la rejoigne.
Nonchalamment, il ouvrit le premier tiroir d’une commode, et choisit une fine badine de cuir, qu’il essaya en donnant plusieurs coups de suite sur le couvre-lit Elle s’abattait avec un sifflement aigu, qui s’achevait en claquement mat.
– J’espère que tu te souviens, interrogea-t-il. Par où est-on punie ?
– Par où on a péché, répondit la jeune femme, les yeux baissés.
– Très bien, tu as bien appris ta leçon. Et par où as-tu péché ce soir, Viola ?
– Par mes seins, Maître.
– Et penses-tu que ta négligence soit pardonnable ?
– Non, Maître. J’ai mérité d’être sévèrement corrigée.
Les bras rejetés en arrière, Viola présentait sa poitrine sans défense. La badine siffla et claqua sèchement. Viola se mordit les lèvres pour ne pas hurler. Tanguy frappa d’abord le sein gauche, puis le droit, dirigeant ses coups de haut en bas, puis de bas en haut, s’attaquant à la face inférieure. Enfin il s’en prit aux bouts dardés, maquillés d’écarlate. Cette fois, Viola cria. Sous la violence du choc, le rouge s’était étalé, barbouillant son buste de traînées d’apparence sanguinolente.
Tanguy ouvrit sa braguette, en sortit un membre long et dur. Il était en pleine érection. Il se planta devant l’esclave agenouillée qui, aussitôt, l’accueillit dans sa bouche.
Gardant ses mains sur la nuque, ainsi qu’il lui avait appris, elle suça humblement la queue érigée de son maître. Elle s’appliquait à le satisfaire en la faisant coulisser entre ses lèvres sans jamais l’effleurer de ses dents, mais la caressant d’une langue active, léchant et lapant le phallus dressé sur toute sa longueur, le gobant de la ventouse humide de sa bouche sans cesser, à l’intérieur, d’exciter le gland en l’enveloppant et en le titillant par petits coups répétés.
Tanguy se laissait aller au va-et-vient de cette suceuse docile qui s’employait à le conduire au plaisir en n’utilisant que les ressources de sa bouche. C’est à peine s’il accentua le rythme de la fellation en donnant lui-même quelques coups de reins pour avancer sa bite plus avant dans la gorge de Viola.
Lorsqu’il sentit venir les prémices de l’éjàculation, il immobilisa la tête de la jeune femme. La précaution n’était pas nécessaire : Viola, connaissant son devoir, était prête à avaler toute la semence qu’il plairait à Tanguy de lui projeter dans la gorge.
Elle ne fut point surprise par le jet du sperme. Une longue et chaude giclée se déversa entre ses joues, qu’elle retint un moment avant de l’ingurgiter. Lorsque Tanguy se retira, quelques gouttes coulèrent encore aux commissures de ses lèvres, qu’elle rattrapa d’une langue agile. Après quoi, elle remercia son maître, qui l’envoya se laver.
Quand elle vint, plus tard, coucher près de lui, elle lui demanda s’il avait bien joui...
– Je jouis toujours bien quand je viens de te punir, tu le sais.
– Je le sais, reconnut Viola. Rien que pour cela, il faut que vous soyez très sévère. Et peu importe si c’est dur, je suis heureuse d’être punie si cela vous donne du plaisir.
Elle se rapprocha de lui, posa la tête contre son épaule.
– Sur mes seins, c’était très douloureux, mais ce qui m’aide à tenir bon, c’est que je sais que chaque coup de badine augmente votre érection...
– C’est drôle, on dirait presque que ni aimes ça, ma parole. Et je vais finir par croire que ta négligence de ce soir était un acte manqué, un prétexte pour te faire battre. C’est quand même la première fois que tu oublies de te maquiller les seins alors que tu sais qu’il y aura des invités...
Viola se releva sur ses coudes et, très sérieusement :
– Qui sait ?
– Que veux-tu dire ? Mais tu rougis... Serait-ce que...
– Je l’avoue. Ce soir, c’était volontaire. Je voulais être punie, pour vous faire bander et pour vous boire.
– C’est que tu es rouée, ma parole ! constata Tanguy en lui tirant doucement l’oreille. Je ne sais pas si je dois être fâché ou ému que tu aies voulu endurer cela pour me plaire.
– Soyez fâché si vous voulez, répondit-elle en lui baisant la main, et punissez-moi encore si vous jugez que je le mérite.
Il lui caressa les seins et, machinalement, pinça un mamelon entre le pouce et l’index, lui arrachant une douce plainte.
– Voilà toute la punition que tu mérites, petite esclave.
– Excusez-moi, ils sont très sensibles après le traitement qu’ils ont subi tout à l’heure.
Elle avança la main entre les cuisses de Tanguy.
– Me donnez-vous la permission ?
– Accordée.
Elle alla cueillir les couilles de son maître et les palpa longuement tandis qu’il sombrait dans le sommeil. Gardant les yeux grand ouverts, elle remémorait le déroulement de cette soirée très particulière...
Georges Delambre était arrivé le premier, vers vingt-et-une heures. C’est Viola qui lui avait répondu quand il avait annoncé son nom par l’interphone, lui indiquant l’étage et le numéro de la porte. Dans l’ascenseur qui l’emmenait au 9ème, Georges avait encore le son de sa voix, si suave, dans l’oreille.
« Serais-tu partant pour un poker vendredi soir ? Il y aura Patrice. Et ce sera l’occasion de te présenter ma nouvelle fiancée, » lui avait demandé son ami. Une vingtaine d’années qu’ils se connaissaient, Tanguy Bellac et lui ! Copains de fac dans les années 70, c’étaient désormais des quadragénaires bien installés, enfin surtout Georges. Patrice et Tanguy avaient à peine dépassé le cap fatal de la quarantaine...
Ils ne se voyaient pas trop souvent, en tout cas moins que du temps où Tanguy était marié à Florence, une grande blonde plutôt décorative, qui avait fini par partir avec leurs deux filles. En ce temps-là, c’est Georges qui changeait souvent de compagne ; depuis, il s’était assagi et, hormis une vieille liaison, « une amitié amoureuse » comme il aimait le dire, sa vie sexuelle était des plus paisibles. Quant à Patrice, veuf de longue date, il affichait une philosophie aussi libertine que désabusée.
Le temps de l’ascension des neuf étages, Georges était piqué par la curiosité, car s’il avait vu Tanguy accompagné de jolies filles, quand ils sortaient en bande au restaurant par exemple, c’était la première fois qu’il allait lui présenter une « maîtresse de maison ». Un événement de taille car, depuis son divorce, Tanguy Bellac n’avait pas l’habitude de s’attacher, et encore moins de présenter aux copains ses éphémères conquêtes.
Bellac l’introduisit lui-même.
– Tu es le premier !
Il l’entraîna dans le living et elle fit son apparition dans l’encadrement de la porte :..
– Puis-je vous débarrasser ?
– Merci...
– Je te présente Viola.
Viola ! Elle était ravissante, ses longs cheveux châtains et ses grands yeux noisette, dans cette longue robe de laine qui moulait sa mince silhouette. Et si jeune... Dans les vingt-quatre, vingt-cinq ans, estima Georges d’un œil de connaisseur.
Tandis qu’ils s’installaient au salon, elle disposa des verres sur un plateau et répartit les zakouski sur les soucoupes. Elle servit un porto vieux à Georges en se penchant vers lui, ce qui eut pour effet de faire bâiller son décolleté et de lui permettre d’entrevoir un peu plus que la naissance de ses seins ; assez en tout cas pour s’assurer qu’elle ne portait pas le moindre soutien-gorge...
– Je vous en prie.
C’était drôle. Dans n’importe quelle autre soirée amicale, Georges se serait aussitôt récrié d’un « Voyons, on peut se tutoyer » qui eût mis tout le monde à l’aise : c’était bien ainsi que les choses se passaient, d’ordinaire, entre eux et leurs compagnes successives...
Cette fois, Georges ne dit rien. Sans doute la différence d’âge justifiait-elle, de la part de cette charmante hôtesse, une vague déférence. Mais Viola ne tutoyait pas davantage Tanguy. Georges se serait bien gardé de leur en faire la remarque, mais il sentait chez ce couple curieusement assorti l’esquisse d’une singularité encore indéfinissable.
Sans doute existe-t-il des conjoints qui manient le vouvoiement, par convention au milieu social ou parti pris d’originalité. Mais entre Tanguy et Viola, le principe était à sens unique. Elle lui disait « Vous », il lui disait « Tu », comme entre un maître et son élève. Simple lubie ?
Georges ne parvenait pas à détacher son regard de l’attrayante silhouette de la jeune femme. À regret, il la vit s’éloigner lorsque le timbre de l’interphone retentit.
Tanguy profita de l’intermède.
– Comment la trouves-tu ? Sincèrement ?
– Mon Dieu, ravissante, oui, et puis drôlement jeune, dis-moi !
– Vingt-quatre. Tu dois penser que je me mets aux nymphettes...
– Pour ça, je te comprends parfaitement.
– Oui, mais vois-tu, avec elle, ce n’est pas l’âge qui compte, c’est plutôt, comment dire, son état d’esprit, son attitude...
– Que veux-tu dire ?
Tanguy Bellac n’eut pas le loisir de répondre. Patrice Schindler faisait son entrée. Tandis que Viola emportait ses effets, il fanfaronna à la cantonade.
– Ave Georgius, ave Tanguinus ! Celui qui va gagner vous salue.
Georges avait toujours détesté chez Patrice son côté m’as-tu vu. Cette fois, il en fut horripilé d’emblée. D’autant plus qu’avant de s’avancer vers eux, Patrice avait familièrement mis la main aux fesses de Viola. Tanguy répliqua du tac au tac.
– Ne te fais aucune illusion, misérable gladiateur. C’est moi qui vais être dans la pénible obligation de vous dépouiller.
Patrice ricana et, claquant des doigts :
– Viola ! Un whisky on the rocks.
Ni merci, ni s’il vous plaît, mais un regard plongeant sans vergogne dans le décolleté de la jeune femme. Devant l’air ahuri de Georges, Tanguy se mit en devoir d’éclairer sa lanterne.
– Ah, je sens que Georges est choqué ! Ne sois pas trop surpris, vieux. Patrice et Viola se connaissent déjà.
– Qu’est-ce que ça change ? Les bonnes manières...
– Les manières de Patrice sont excellentes, en l’occurrence. Pourquoi penses-tu que je l’ai baptisée Viola ? Auparavant, elle s’appelait Marie-Hélène comme tout le monde. Mais ça ne lui allait pas trop. Ce qui est drôle Tiens, Patrice, je ne t’ai jamais raconté ça, c’est que j’ai cru inventer ce nom de toutes pièces. Figure-toi qu’il est dans Shakespeare : c’est l’héroïne de La Nuit des Rois ! Moi, je l’avais choisi pour sa consonance, pour exprimer que, dans mon esprit, elle devait être offerte à un viol permanent.
Georges faillit s’étrangler sur son verre de porto.
– Qu’est-ce que tu racontes ? Vous avez des rapports pervers, ou quoi ?
– Pervers ?
Tanguy eut un petit rire supérieur, relayé par un ricanement gras de Patrice.
– Mon pauvre Georges, fit Tanguy, tu en es encore là ?
– Comment peut-on parler de perversion, enchaîna Patrice, si les deux partenaires partagent le même goût ? Ce dont je me félicite, soit dit en passant, puisque ça m’a donné le plaisir de goûter aux charmes de cette belle pouliche...
– Jolie façon de parler de la fiancée d’un copain.
Cette fois, Tanguy se mit à rire de bon cœur.
– Sacré Georges, tu ne changeras pas. Toujours aussi idéaliste. Mais puisqu’on te dit qu’elle est consentante. D’ailleurs, si tu veux vérifier. Viola !
– Oui, Maître ?
Le terme employé spontanément résonna pour Georges comme une obscénité, ou plutôt une incongruité. Il faillit se lever et quitter les lieux. Oh, bien sûr, il avait lu des livres, vu des films, entendu parler en long et en large de ce genre de rapports. Mais que ces choses pareilles se passent sous ses yeux, avec sa complicité tacite, puisqu’il ne protestait pas, le mettait dans un état de malaise.
Cependant, tout en se traitant de lâche, Georges ne voulut pas avoir l’air ridicule. Il imaginait les rires et les sarcasmes, sitôt qu’il aurait le dos tourné. Ils n’auraient pas fini de lui faire une réputation de boy-scout, de rêveur, d’idéaliste. Et puis, il croisa le regard de Viola, son sourire qu’il aurait juré radieux. S’il était feint, elle était bonne comédienne.
Il se laissa donc guider lorsqu’elle les entraîna vers la table dressée dans un coin de la pièce, pour une rapide collation qui devait précéder le grand jeu. Tanguy servit cérémonieusement le Pouilly-Fuissé et Viola fit passer le saumon mariné à l’aneth.
– Si je m’attendais à ça ! avoua Georges, profitant de ce que la jeune femme était repartie vers la cuisine. Je croyais que tu avais des relations normales avec les femmes.
– Normales, pas normales... Qu’est-ce que ça veut dire ? Il faut en finir, mon cher Georges, avec les rêveries des années 70. Le féminisme et ses utopies, c’est dépassé. Ce qui compte, c’est notre nature profonde, et tu dois bien convenir que la nature profonde de la femme est de se laisser mener. Une fille comme Viola, que crois-tu qu’elle attende d’un homme ? D’être prise en main, éduquée, en un mot : dominée.
– Que tu le veuilles ou non, renchérit Patrice, c’est par là que passe la véritable harmonie entre les sexes.
– C’est pour ça qu’il faut les choisir jeunes, poursuivit Tanguy. Regarde Viola, elle pourrait être ma fille, ou presque. C’est l’idéal pour qu’elle trouve en moi l’autorité qu’elle est en droit d’attendre d’un homme. Et c’est seulement lorsque ce besoin sera parfaitement comblé qu’elle sera une femme accomplie.
Viola était discrètement revenue de la cuisine et écoutait le discours de Tanguy. Georges voulut la prendre à témoin.
– Tout ça est bien joli, mais vous ne lui demandez pas son avis, à elle, la principale intéressée.
Tanguy, avec un sourire ironique, fit un signe à Viola.
– J’espère devenir une femme accomplie, fit celle-ci, grâce à l’autorité de mon maître.
Georges observa que la belle amie de Tanguy ne parlait que lorsqu’on lui posait une question. Depuis le début de la soirée, elle gardait le même maintien réservé, le regard modestement baissé, les bras le plus souvent le long du corps.
– On dirait qu’elle récite une leçon, ou son catéchisme ! Je ne sais pas comment tu as pu lui faire croire à de telles sornettes. Peut-être Marie-Hélène était-elle en quête du père ? Tu as dû prendre cette place-là auprès d’elle.
– Psychanalyse de Prisunic, le coupa Patrice en ricanant. Viola est une femelle qui se reconnaît comme telle, un point c’est tout.
– Et elle doit abdiquer sa dignité ? fit Georges en s’énervant soudain. Permettez-moi de ne pas être d’accord. Bon, vous avez l’air de me prendre pour un naïf, mais je m’intéresse autant que vous aux fruits verts. Et il est normal, pour une jeune fille, qu’un homme plus âgé soit son Pygmalion, et probablement son professeur en amour. Mais il s’agit de l’initier, de l’éduquer, pas de la dominer.
– C’est que tu n’oses pas aller jusqu’au bout, réitéra Tanguy. Que tes préjugés ridicules t’empêchent de reconnaître que tu rêves d’en faire ton esclave.
– Comment ? fit Georges abasourdi.
Des images défilaient à toute allure dans sa tête. Des photos dans les magazines, des films et des cassettes, des récits et des romans, qui tournaient tous autour de ce thème sulfureux de la domination et de la soumission... Était-il possible que ces amis si normaux fussent les adeptes de ce genre de perversion ?
– Je ne te dis rien de plus, reprit Tanguy. Dans ce domaine, ce ne sont pas les mots qui comptent, ce sont les actes. Sache en tout cas que Viola m’est totalement soumise. Bien sûr, ce ne fut pas si facile, et son dressage a demandé quelques semaines. Mais crois-moi, cela en valait la peine ! Je te choque ?
– J’avoue que... Tu le sais bien, j’ai toujours été convaincu que tout était permis en amour. Mais ça, ce n’est plus de l’amour. Et s’il y a des choses qui se passent dans le secret des alcôves, le proclamer ainsi...
– Oh, inutile d’être ostentatoire ! Il y a des blaireaux qui pourraient se formaliser. Et puis ce qui compte, c’est que la soumission soit sans faille. Tu comprends maintenant pourquoi celle qui était Marie-Hélène est devenue Viola. Je l’ai rebaptisée pour sanctionner sa nouvelle naissance, son entrée dans son nouvel état, où je la guide et la protège. En échange, elle me doit une obéissance absolue. Les cigares, Viola.
La superbe créature se dirigea vers un meuble bas. En s’inclinant, elle mit en valeur sa chute de reins et son galbe fessier, bien dessiné sous la robe étroite.
– Jolie croupe, n’est-ce pas ? fit Tanguy soudain égrillard..
– Et ce n’est rien, comme ça, il faut la voir à l’état naturel ! ajouta Patrice en gloussant.
En son for intérieur, Georges condamnait sans ambages la crudité et la vulgarité affectée par les deux hommes. Mais il devait bien admettre l’ambiguïté de sa position : au vu de cette robe moulante, il ressentait déjà une érection naissante. Lorsque Viola apporta la boîte de cigares et se pencha pour les lui présenter, elle offrit de nouveau à Georges une vue indiscrète sur ses seins. Il ne put s’empêcher de lorgner par l’entrebâillement du décolleté, et Tanguy profita de l’avantage :
– Belle paire, hein ? Elle ne te laisse pas de glace, dirait-on. Comme tu peux le constater, je lui interdis formellement le port du soutien-gorge.
– Je n’ai jamais prétendu que ta... fiancée... ne soit pas attirante, répliqua Georges. Simplement, ce n’est pas mon habitude de parler des femmes en ces termes-là. Et encore moins de les contraindre à quoi que ce soit !
– C’est pourtant pratique, répliqua Patrice. Regarde Viola, elle est bandante. Au lieu d’avoir l’œil oblique, tu ne voudrais pas qu’elle fasse glisser sa robe et nous les montre, ses nichons ? Pour cela, dis-toi bien qu’il suffirait que Tanguy lui en donne l’ordre.
Georges posa son verre et tenta de protester :
– Le plaisir, avec une fille qui me plaît, c’est effectivement d’obtenir qu’elle me les montre, mais par la douceur et la persuasion.
– Là, je t’arrête, fit Tanguy. Tu te fais une idée fausse des femmes, mon vieux. Crois-moi, elles n’attendent pas d’être convaincues, mais vaincues. L’obéissance est une jouissance qui passe avant toutes les autres pour ces petites créatures. D’ailleurs, je vais t’en fournir la preuve immédiate... Viola !
– Non. Arrête.
Georges s’était levé.
– Je suis désolé, j’étais venu ce soir pour une simple partie de poker entre copains. Okay quand vous êtes seuls, mais je ne veux pas être le témoin de ce genre d’avilissement.
– Quel raisonnement ! railla Patrice.
– Va-t-en si tu veux, menaça soudain Tanguy. Mais sache que c’est elle qui le paiera.
– Pardon ? Que me chantes-tu là ? Qu’est-ce que c’est encore que cette invention ?
– Du simple bon sens. Si tu quittes les lieux, c’est que tu n’as pas envie d’admirer le buste de Viola. Donc, elle n’a pas su séduire notre invité comme c’est son devoir. Ce qui mérite une punition. C.Q.F.D.
Georges n’en revenait pas de cette outrecuidance. Ainsi, ce serait lui le responsable !
– Je vois, fit-il en maugréant. Tu m’obliges à rester. Mais le procédé est déloyal.
– Allons, assez de mauvais esprit, laisse-toi faire. Tu vas voir, ça vaut le coup d’œil.
Tanguy eut un claquement de doigts, dont Viola connaissait assurément la signification. Pourtant, elle resta immobile, pétrifiée. Tanguy réagit au quart de tour :
– Eh bien ? Que t’arrive-t-il ? Quelle est cette stupide réticence ?
– Il vaut mieux en rester là, insista Georges.
– Je t’en prie, ceci ne te regarde plus. Je ne comprends pas ce qui lui arrive, mais fais-moi confiance, je vais y mettre bon ordre. Alors, toi ? C’est le moment que tu choisis pour me faire honte devant des amis. Tu as dix secondes pour te découvrir.
Alors, Viola eut l’air résigné. Murmurant un mot d’excuse, lentement, elle commença par se dénuder les épaules. Elle retourna les bras en arrière pour chercher le crochet de la fermeture à glissière qui, dans son dos, épousait sa colonne vertébrale.
Elle s’approcha de Georges et lui tourna le dos.
– Auriez-vous la gentillesse de...
Il ne pouvait plus se dérober. Il saisit le morceau de métal entre le pouce et l’index et tira vers le bas, découvrant en un éclair le dos nu de Viola. Il écarta lui-même les pans de tissu pour mieux le contempler, et crut ressentir un frisson chez la jeune femme quand il effleura sa peau soyeuse, qui sembla très chaude au bout de ses doigts. Enfin, encouragé par les deux autres, il acheva de faire glisser le vêtement jusqu’à la taille, dégageant les bras et dévoilant entièrement le buste.
Elle se retourna lentement.
– Ah, je comprends tout ! s’écria Tanguy.
S’étant levé, il attrapa sa fiancée par le bras et lui assena une paire de gifles rapides et sonores.
– Voilà pourquoi tu n’avais pas la conscience tranquille ! Prends déjà ça, on réglera nos comptes plus tard. En attendant, file à la salle de bains et ne reviens que lorsque tu seras présentable.
Viola s’enfuit en avalant ses larmes. Outre le froissement du tissu quand elle s’éloigna, Georges aurait juré avoir entendu un léger tintement...
– Là, tu nous dois une explication, s’exclama-t-il.
– Question de discipline. Attends un peu... Un doigt de cognac, les amis ?
– Pourquoi pas !
Patrice avait l’air hilare.
– L’erreur est humaine, et plus encore, féminine, blagua-t-il. Allons, un peu d’indulgence.
– Pas d’accord, répondit Tanguy. Le maître indulgent est plus coupable que l’esclave fautive. Mais que fabrique-t-elle ? Ah, enfin !
Tandis que Georges était atterré de l’étrange comportement de ses amis, Viola les rejoignit. Elle avait abandonné la robe au profit d’une jupe longue d’un blanc cassé et ne portait rien au-dessus. Sa belle chevelure auburn retombait sur ses épaules, mais ce qui attirait d’abord le regard, c’étaient deux taches rouge vif : la jeune soumise s’était maquillé les pointes des seins, et Georges comprenait maintenant la raison de la mauvaise humeur de Tanguy. Viola avait sans doute enfreint une de ses directives en négligeant de souligner ainsi, au bâton de rouge, les proéminences de sa poitrine.
– Voilà qui est mieux, admit Tanguy d’un ton satisfait.
Les seins de Viola frappaient autant par la perfection de leur galbe, cette plénitude que mettait en valeur la minceur de sa silhouette, que par leur décoration. Georges était fasciné par ce maquillage précis et raffiné : l’écarlate agressif des mamelons se détachait sur le subtil dégradé rose qui recouvrait les aréoles, dont la délicate régularité n’était entachée d’aucune excroissance superflue.
Tanguy semblait amusé par le regard insistant de Georges..
– Vas-y, mon vieux, ne te gêne pas ! Tu as le droit de toucher.
– Ne compte pas sur moi, je trouve ça dégradant.
– Tu as tort, fit Patrice en riant. Puisque c’est comme ça, c’est moi qui vais en profiter. Ici, Viola !
Tanguy se fit impératif :
– Eh bien, Viola, qu’attends-tu ?
Comme en répétant des gestes bien appris, la jeune femme s’approcha de Patrice presque à le toucher et se mit à genoux. Levant les bras, elle souleva sa chevelure, inclina la tête et, dans la pose la plus gracieuse, cambra légèrement le buste pour mieux l’offrir aux regards et aux attouchements.
Ce faisant, elle mit aussi en valeur le singulier collier qu’elle portait, d’argent ou d’or blanc, garni de deux anneaux, l’un par devant, l’autre à la nuque. Patrice effleura le bijou, que Tanguy vanta aussitôt :
– Tu as remarqué ? C’est le signe de son allégeance. Très pratique pour l’attacher si on le désire, ou pour la tenir en laisse ! Mais qu’attends-tu ? Ils ne te font plus envie ?
Patrice ne se le fit pas dire deux fois : ses paumes se placèrent sous les globes palpitants. Il les soupesa et les palpa en les enserrant petit à petit de tous ses doigts. Il remonta de part et d’autre de cette poitrine tendre et ferme, totalement soumise à ses caresses. Il rapprocha les deux seins, les pressant l’un contre l’autre, puis explora la gorge, les clavicules et les épaules, caressant partout avant de descendre à nouveau, de masser longuement la poitrine par-dessus et par-dessous.
Il se retint seulement de taquiner les bouts pointus, dissuadé par le rouge qu’il aurait à coup sûr étalé en détruisant l’harmonie de ce maquillage élaboré avec soin. Maintenant, on ne pouvait plus ne pas apercevoir la protubérance qui gonflait, à gauche de sa braguette, déformant l’étoffe de son pantalon.
Tanguy observait la scène en tirant sur son cigare. Malgré lui, Georges sentait monter en lui une excitation qui lui répugnait. En même temps, il tentait de minimiser la portée d’une conduite aussi scandaleuse : après tout, de toute évidence, la jeune femme était consentante. Comme s’il devinait ses pensées, Tanguy attaqua :
– Tu as eu tort, Georges. Tu regrettes, maintenant, n’est-ce pas ? Mais ne t’en fais pas, tu auras encore ta chance. Car, ajouta-t-il en se levant, mes chers amis, je vous l’annonce dès maintenant : si le jeu tourne à votre avantage, cette jeune esclave sera l’enjeu de la partie.